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Passage à la vitesse supérieure (1916-1928)

Sur la base de la Chevrolet Type H, il fait élaborer un modèle simplifié qu’il fait assembler par les concessionnaires eux-mêmes, de façon à en réduire le prix et à accélérer les délais de livraison. Il propose la nouvelle venue au prix de 490$, soit 5$ de moins que la Ford T. De façon habile, il la désigne sous la référence de ‘Model 490’.

Un véritable jeu d’enfant (1916-1922).

La ‘Four-Ninety’ a un empattement réduit à 2,59 m et la puissance de son moteur de 2.802 cm3 est limitée à 20 ch. (comme la Ford T). Elle est proposée en deux carrosseries : un Roadster et une Touring. Comme la Ford, la 490 n’est disponible qu’en noir ! Vendue dès le mois de juin 1915, la 490 est un succès : 4.661 voitures sont commandées en deux semaines. Billy Durant prétend même que « un enfant peut en vendre une » ! Mais ce tarif de 490$ ne permet de dégager aucune marge, et Durant n’a pas la capacité industrielle pour suivre Ford dans une guerre des prix. Raisonnablement, il se réoriente sur le créneau de la voiture bon marché mais bien équipée. Dès 1917, il propose une Touring équipée de rideaux latéraux (translucides au niveau des portes), l’Enclosed All Season Touring, qui permet de rouler par tous les temps, alors que le premier utilitaire Chevrolet voit le jour sous l’appellation de ‘Light Delivery’ (camionnette légère) avec une demie-tonne de charge utile. Il est accompagné d’une version capable de transporter une tonne de charge utile : le One Ton Truck, établi sur un empattement de 3,05 m, et vendu 1.245$. En 1918, la 490 reçoit ses premières carrosseries fermées avec un Coupé à 2 places et une Sedan à 2 portes et à 5 places, qui devient Coupé 4 places en 1922 quand la Sedan à 4 portes apparaît. Le One Ton Truck voit son empattement atteindre 3,175 m et Chevrolet le rebaptise, non sans malice, Model T !

Les Model F (1917-1922).

En 1917, le Type H devient ‘Model F’ ; son moteur est réalésé à 3.671 cm3 et sa puissance est de 37 ch. Rebaptisé Model FA en 1918, sa gamme est complétée par une carrosserie de Sedan 2 portes à 5 places dont la porte passager est installée au centre de la caisse pour faciliter l’accès aux places arrière et dont le dossier du siège avant droit peut basculer de sorte que son passager peut s’assoir dans le sens de la marche ou faire face au passager arrière ! L’empattement est porté à 2,79 m en 1919, et la voiture devient Model FB. Une quatrième carrosserie complète l’offre : la Sedan à 4 portes, première voiture de ce type proposée par Chevrolet. En 1921, une version utilitaire est dérivée sur un empattement de 3,05 m, le Model G, capable de transporter une charge utile de 750 kg.

La première Chevrolet V8 (1917-1919).

Au sommet de la gamme, Durant décide – près de 40 ans avant l’apparition du célèbre ‘small block’ – de remplacer le 6 cylindres par un V8, à la façon de Cadillac qui a rencontré un succès considérable avec son modèle depuis 1915. La voiture est établie sur un empattement de 3,05 m et son poids atteint 1.450 kg. D’une cylindrée de 4.719 cm3, ce V8 développe 55 ch. Il dispose d’un arbre à cames central qui actionne des soupapes en tête. Le modèle est proposé en deux carrosseries découvertes : Chummy Roadster et Touring. Annoncée comme “Une Chevrolet nouvelle et plus grande”,  il coûte 1.385$ (plus qu’une Buick) mais ne convainc pas la clientèle : il n’est produit qu’à 511 exemplaires en 1917. Sa production atteint 2.199 exemplaires en 1918 grâce aux commandes de l’armée américaine qui s’en sert comme voiture de liaison, mais elle est arrêtée au cours de l’année 1919, après une production de 71 exemplaires seulement.

Le Model M (1923).

Pour 1923, Chevrolet se propose d’élargir son offre technique. Depuis 1921, Charles Kettering travaille sur un moteur à 4 cylindres refroidi par air, à l’instar du constructeur de luxe Franklin, pour produire un moteur léger, économique à fabriquer et facile à entretenir. Présenté en janvier 1923 sous le capot de la Chevrolet Model M, surnommée ‘Copper-Cooled’ (refroidie par cuivre), sa cylindrée est de 2.212 cm3 et sa puissance est de 22 ch. Le refroidissement est assuré par des ailettes en cuivre en forme de U sur les cylindres (d’où son surnom). La voiture est proposée à un prix supérieur de 200$ à la Chevrolet 490. Malheureusement, le refroidissement des cylindres ne s’effectue pas de façon correcte et le moteur surchauffe. Après en avoir fabriqué 500, Chevrolet décide de les rappeler tous et met un terme à l’expérience … qui ne connaîtra de suite que 36 ans plus tard !

La naissance d’un géant.

A partir de 1916, les ambitions de Durant de battre Ford se concrétisent. Les capacités de production de Chevrolet se développent au fur et à mesure qu’il fait construire ou prend le contrôle d’un nombre de plus en plus important d’usines, comme celle de Warner Gear à Toledo (Ohio), mais Ford construit dix fois plus de voitures. En 1917, la production dépasse les 100.000 exemplaires et Chevrolet annonce avoir réalisé un bénéfice de 6 millions de dollars en 6 années d’existence ! Dès 1918, le rapport de force avec Ford est réduit à 5 contre 1. Le 2 mai, Chevrolet fusionne avec la General Motors. En 1919, Chevrolet devient le 2° constructeur américain et la marque dispose d’un réseau de 500 concessionnaires à travers le pays. Malheureusement, une crise économique frappe le marché américain en 1920 et les actions de GM s’effondrent brutalement ; Durant est à nouveau écarté de la présidence de la société. La direction de Chevrolet est confiée à l’ingénieur Karl W. Zimmerschied, mais à la fin de 1921, la production est en recul de 11% et les pertes s’élèvent à 8,7 millions de dollars. En mars 1922, Zimmerschied, en retraite, est remplacé par William S. Knudsen (surnommé Big Bill). La GM met alors en œuvre sa politique de segmentation du marché : Chevrolet se voit assigner le bas du marché, avec un seul modèle.

La Superior (1923-1926).

La ‘490’ devient alors la ‘Superior’, de façon à indiquer qu’elle est au-dessus de la Ford T. La marque adopte également le concept de vieillissement dynamique annuel de la gamme, et une désignation spécifique est attribuée à chaque année. La gamme de 1923 est ainsi baptisée Series B (l’appellation de Series A étant attribuée rétrospectivement à la 490 de 1922). Mécaniquement, la Superior se distingue par son empattement allongé à 2,62 m. La gamme des carrosseries comprend l’Utility Coupé, un coupé destiné aux représentants de commerce et aux professions libérales avec un vaste volume de chargement derrière les sièges. La Superior est également proposée en châssis nu pour les carrossiers de voitures particulières (le Touring Chassis) et pour les carrossiers de véhicules utilitaires (le Commercial Chasis), ainsi qu’en camionnette légère (Light Delivery). L’offre est complétée par un châssis destiné aux utilitaires plus lourd, l’Utility Express Truck Chassis, établi sur un empattement de 3,05 m, et référencé comme Series D.En 1924, pour la Series F, apparaissent des versions DeLuxe qui se distinguent des versions normales par des roues à voile en acier, une calandre et des phares nickelés. Le Truck Chassis prend l’appellation de Series H. Avec la Series K de 1925, la puissance du moteur atteint 26 ch., l’antique embrayage à cône est remplacé par un modèle à plat et les ressorts quart-elliptiques arrière sont remplacés par des ressorts semi-elliptiques. Les carrosseries sont un  peu plus spacieuses mais le style reste toujours aussi terne, avec des composants de qualité médiocre. Le Truck Chassis prend l’appellation de Series M et il est dédoublé d’une version à empattement de 3,15 m, la Series R. Pour 1926, la Series V reçoit des améliorations mécaniques mineures. Tout juste peut on noter qu’en fin d’année tous les modèles fermés sont équipés de roues à voile, c’est même la dernière année des roues en bois montées en série. La plus chère des Series V est la Landau Sedan à 765$ ; une Sedan équipée d’un toit en toile et de faux compas de capote pour lui donner l’apparence d’une décapotable ! Le Truck Chassis de 3,25 m d’empattement est référencé comme Series X. Commercialement, la Superior est la Chevrolet qui accroche fermement Chevrolet à la deuxième place du marché. Mais Ford produit 6 fois plus de voitures. La General Motors s’implante en Europe dès 1923 avec une usine d’assemblage à Copenhague. La première Chevrolet construite en dehors du continent américain en tombe des chaînes le 7 janvier 1924. En 1926, la production atteint 547.724 unités et l’écart avec Ford n’est plus que de 3 contre 1 ! Chevrolet dégage alors un bénéfice de 50 millions de dollars et une usine est construite à Hamtramck.

Fort de ces succès, Big Bill Knudsen envisage l’avenir avec optimisme et demande à ses ingénieurs de développer un nouveau moteur à 6 cylindres. Désormais, l’appellation des modèles change à chaque millésime. Pour 1927,  la Superior devient ainsi la Capitol, la version utilitaire est baptisée 1/2 Ton Truck Chassis et l’Utility Express, sur empattement de 3,15 m, devient le Capitol LM. En 1928, la Chevrolet reçoit le nouveau châssis de 2,72 m d’empattement destiné au futur 6 cylindres. Elle devient la National, et l’Utility Express devient  Capitol LO puis Capitol LP. Les résultats dépassent les espérances des responsables de Chevrolet et de la General Motors ; avec 1.001.820 unités, Chevrolet devient le premier constructeur américain en 1927, Ford ayant arrêté toute production de son usine pour passer à son nouveau Model A. L’exploit est réédité en 1928 avec 1.193.212 Chevrolet contre 607.592 Ford. Au niveau des infrastructures, Chevrolet prend le contrôle de la fonderie de Saginaw (Michigan).

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